Le remérage des ruches

Si une reine peut avoir une longévité théorique importante (5 ans), il n`en est pas souvent ainsi dans les faits car les colonies soit essaiment soit se remèrent plus ou moins régulièrement.

En ce qui concerne l’apiculteur, il a tout intérêt à posséder des colonies ayant des reines jeunes (moins de 3 ans) sachant que c’est la 2ème année que la vitalité est la plus grande tout en présentant le moindre risque d’essaimage et d’orphelinage hivernal.

Donc, si les ruches ne se remèrent pas d’elles-mêmes suffisamment tôt (caractère que l’on peut sélectionner si l’on prend la peine de marquer les reines et de noter leur âge à chaque visite de printemps), l’apiculteur se doit d’organiser le renouvellement des reines au risque de voir son rucher présenter l’aspect traditionnel du rucher d’amateur pratiquant une l’apiculture résignée ou de « cueillette » composé de 1/3 de bonnes ruches 1/3 de bien moyennes et 1/3 de médiocres. Certaines années seulement le premier tiers sera productif.

Comment maîtriser l’âge de ses reines ?

Selon la taille du rucher, il est raisonnable d’adapter la méthode de production des reines.

Pour un rucher d’une quinzaine de colonies, on peut considérer que seulement 5 à 7 reines devront être produites. II n’est donc pas raisonnable d’opter pour une méthode d’élevage mettant en action la technique du prélèvement de larves d’une colonie sélectionnée qui seront ensuite mises à élever en grand nombre dans une colonie orpheline spécialement préparée pour cela et très peuplée en jeunes abeilles nourrices, d’autant moins que cette technique nécessite du doigté et un matériel particulier. Par contre, il sera aisé de prélever des cellules royales dans une colonie choisie, stimulée et orpheline au préalable voire même dans une colonie préparant son essaimage. Quoi qu’il en soit, la nécessité de trouver les reines parmi toutes les abeilles apparaît clairement ; c’est donc par cela que nous allons aborder le problème.

Comment trouver la reine ?

1) – Visiter systématiquement tous les cadres (surtout les cadres de couvain). Il faut enfumer peu pour ne pas concentrer les abeilles au bas de la ruche, avoir une bonne vue, ainsi qu’une pratique courante. Une visite précoce en saison (la population est plus faible) permettra de trouver aisément la reine et de la marquer d’une tache de couleur.

2) – Une grille à reine permet de tamiser les abeilles, et de ne conserver que la reine et les mâles qui sont plus volumineux. C’est une technique courante, facile et rapide qui nécessite peu de matériel et que vous pouvez venir observer au Rucher-Ecole Louis MICHEL. Il faut disposer d’un corps de ruche et de quelques cadres bâtis pour supporter les abeilles, d’une grille reine et d’une hausse vide qui sert d’entonnoir. Les cadres de couvain portant les abeilles seront secoués un à un sur la grille et après un léger enfumage il ne restera sur le dessus de la grille que les mâles et la reine.

3) – En début de miellée (surtout si les reines pondent dans les hausses) un enfumage copieux de l’entrée de la ruche fait parfois monter la reine dans la hausse, surtout si on lui en laisse le temps. Il suffit alors de glisser une grille à reine entre la hausse et le corps. Un simple enfumage léger sur le dessus des cadres fera redescendre les ouvrières et laissera la reine sur la grille. Cette méthode est plus aléatoire.

De façon systématique pensez à marquer vos reines, soit à la visite de printemps, soit lorsque vous la rencontrez par hasard. Cela vous permettra de la trouver facilement lorsque vous en aurez besoin.

Comment remérer une colonie ?

Lorsque vous êtes capable de trouver une reine, vous pouvez obtenir facilement des cellules royales. Il ne vous reste plus qu’à programmer les différentes taches et à choisir parmi les multiples possibilités celle qui vous permettra de constituer des colonies avec de jeunes reines. La meilleure période étant dans nos régions le mois d’Avril, il faut prévoir d’orpheliner la colonie sélectionnée huit jours avant de disposer des cellules royales. Il n’est pas nécessaire de sacrifier la reine d’une telle colonie ; on peut aussi constituer pour elle un petit essaim sur deux cadres de couvain qui, bien stimulé, pourra devenir une colonie productive sur une miellée tardive. Lorsque les cellules royales sont disponibles, plusieurs possibilités s’offrent à vous.

1 – Méthode de l’éventail.

La colonie orpheline est divisée en plusieurs essaims, ou nuclëi,, contenant tous au moins une cellule royale.
Chacun de ces nucléï pourra ensuite, lorsque les reines seront fécondées et en ponte, venir renforcer et ainsi remèrer les colonies aux reines âgées que vous orphelinerez 36 H avant l’opération.

2 – Méthode par greffage de cellules royales.

Les colonies à remèrer ayant été orphelinées 24 H auparavant, elles seront divisées en essaims plus petits auxquels vous apporterez une cellule royale, soit en découpant sur un cadre, soit en ajoutant le cadre lui-même.
Il est préférable de diviser les colonies à remèrer si celles ci sont assez fortes afin d`éviter un essaimage lorsque plusieurs reines naîtront, des réunions ultérieures étant toujours possibles. Ainsi deux essaims sur 3 cadres de couvain peuvent constituer une colonie sur 6 cadres de couvain et une jeune reine en ponte qui sera sacrifiée, ou utilisée pour remèrer une autre colonie (Voir paragraphe 4).

3 – Méthode par orphelinage simple.

Si la production de cellules royales vous ennuie, vous pouvez vous contenter d’orpheliner la colonie à remèrer et lui laisser élever seule une nouvelle reine.. Il suffit alors de ne pas le faire trop tôt en saison afin que la température, la force de la colonie et la présence de bourdons soient facteurs favorisant l’opération.

Il ne faut pas non plus le faire trop tard au risque de provoquer un essaimage naturel si la colonie est trop puissante.

Cette méthode ne permet pas de sélectionner la souche à multiplier.

4 – Introduction de reines vierges où fécondées.

Il est aussi possible d’introduire dans un nucléus une reine déjà active, néanmoins quelques précautions sont nécessaires :

  • le nucléus ne doit pas être trop fort ;
  • le nucléus doit être orphelin depuis 36h et exempt de cellules royales la reine doit être introduite seule en cage ou sous un grillage sur couvain naissant puis libérée 2 jours après ;
  • il est préférable que les reines vierges soient très jeunes, voire même naissantes ;
  • la méthode qui consiste â engluer la reine dans du miel n’est pas très sûre; les abeilles noires préfèrent les reines de même race ;
  • l’anesthésie de la colonie au protoxyde d’azote est possible, mais seulement préconisée pour des ruches bourdonneuses qu’il est selon moi préférable d’éliminer.

Quelle que soit la méthode que vous choisirez parmi celles qui précèdent et qui sont les plus simples ou parmi les multiples plans décrits dans les différents ouvrages apicoles, souvenez vous qu’il est toujours préférable de supprimer une reine tant qu’elle est encore bonne, qu’une colonie forte élève de meilleures reines qu’un petit essaim et que l’essentiel de l’élevage est la « période avant l’operculation des cellules royales ».

Texte : Marc FOUGEROUSE

 Bulletin N° 18 Mars 2001